Qu'est ce qui ne va pas avec les Stores vendant des applications ?
Historiquement, les app stores n'ont presque pas d'amis et on bien d'ennemis. Bon, peut-être pas vraiment des ennemis, mais des personnes et des entreprises qui ont des sérieux ennuis avec les app stores. En partie c'est dû à l'immense commission qu'ils prélèvent (30 %, ce n'est pas une blague pour un développeur qui essaie de gagner honnêtement sa vie). En partie à cause du monopole et du contrôle total que les magasins d'applications exercent sur les applications.
Par conséquent, nous entendons de plus en plus souvent parler de diverses poursuites judiciaires (Epic Game Store vs Apple par exemple) et les initiatives gouvernementales qui visent à réduire leur domination du marché. Des initiatives similaires ont dejà eu place en Russie, Korée du Sud, Hollande. Enfin, la commission judiciaire du Sénat américain a adopté un projet de loi qui, s'il devient une loi, changera radicalement le paysage et obligera Google et Apple à céder le contrôle total de leur boutiques d'applications. Cela signifierait, entre autres, la possibilité de charger des applications en parallèle et d'utiliser des outils alternatifs de traitement des paiements.
Mais je ne suis pas ici pour vous dire comment nous, en tant qu'organisation commerciale, ne sommes pas particulièrement ravis de payer les commissions exorbitantes. Pas parce que c'est sans importance, mais parce que chez AdGuard, nous nous considérons avant tout comme des ingénieurs logiciels. Notre priorité absolue est de faire un bon travail de développement de notre logiciel et d'apporter quelque chose de nouveau et de réellement utile à ce monde. Et c'est sur ça je voudrais me concentrer dans cet article.
La belle idée face à la réalité cruelle
En tant que concept, les magasins d'applications sont décidément merveilleux. Ils résolvent un certain nombre de problèmes : c'est facile d'installer une application à partir du magasin, beaucoup de choses sont prises en charge pour les développeurs, comme la distribution, les mises à jour, les processus de paiement. Sans compter que les magasins d'applications garantissent plus ou moins la sécurité et un certain niveau de qualité pour leurs applications.
Malheureusement, au fil du temps, les directives des magasins d'applications ont pris de l'ampleur. Elles ne se limitaient plus à définir les aspects liés à la sécurité et à la qualité. Un grand nombre de restrictions de toutes sortes sont apparues, et il est souvent difficile de les expliquer par autre chose que le désir d'écraser la concurrence.
Nous, en tant qu'entreprise qui développe plusieurs applications qui sont toutes téléchargées sur des magasins d'applications populaires, sommes poussés à réfléchir en termes de "Que pouvons-nous faire pour ne pas être rejetés par Apple/Google ?", plutôt que "Comment pouvons-nous améliorer nos applications ?". Comment cette approche peut-elle faciliter l'innovation?
Et pour ajouter à cela, il n'y a pas de "règles du jeu". Aussi détaillées que soient les directives, il y a toujours place pour des interprétations différentes. Oh, vous avez inventé une nouvelle fonctionnalité et vous voulez savoir si votre application sera expulsée de la boutique ou non ? Pas de chance, la seule façon de le savoir est de dépenser du temps et des ressources pour l'implémenter, de soumettre l'application à un examen et de prier son Seigneur. Nous avons acquis une certaine expérience en la matière, sans pour autant dire que cette expérience a toujours été positive, autant avec Google Play Store de Google que avec App Store de Apple ([1], [2]).
Les deux plus grandes boutiques d'applications présentent toutefois des différences majeures l'une par rapport à l'autre.
Avec Google, vous pouvez généralement compter sur le passage de votre mise à jour. Cependant, il suffit de peu de choses pour que votre application en soit retirée à tout moment, apparemment au hasard. Et lorsque cela se produit, bonne chance pour contacter quelqu'un - n'importe qui - du service d'assistance du Google Play Store. Vous n'obtiendrez qu'une réponse standardisée d'un robot. Ne pas avoir son application sur le Play Store est un cauchemar pour toute entreprise. Mais il existe au moins une option de chargement latéral des applications sur Android. Ainsi, si vous le souhaitez vraiment, vous pouvez vous permettre de créer une application qui vous ressemble, et non celle que Google veut que vous créiez.
Par contre l'App Store est une histoire totalement différente. Si l'évaluateur n'a pas aimé votre application et il a décidé qu'elle ne respecte pas l'une des nombreuses directives de l'App Store, vous pouvez essayer de le contacter pour le faire changer d'avis. J'ai personnellement passé d'innombrables appels téléphoniques avec des représentants de l'équipe d'évaluation de l'App Store pour tenter de les persuader de changer leur décision, et bien que la plupart de ces tentatives n'aient pas abouti, je suis toujours reconnaissant de cette opportunité.
Mais l'un de ces appels s'est gravé profondément dans ma mémoire. Sans entrer dans les détails inutiles, je disais que la clause du règlement à laquelle ils se référaient ne pouvait pas s'appliquer à mon cas (et je le maintiens à ce jour). À un moment donné, l'examinateur, apparemment fatigué d'argumenter, a simplement répondu :
"Ecoutez, nous sommes Apple. Ce sont nos règles, et nous allons les interpréter comme bon nous semble, tout ce qu'il vous reste à faire c'est d'obéir".
Difficile de trouver un contre-argument à cela. La seule chose qui nous restait à faire était de revenir sur la moitié de ce qui avait été fait à ce moment-là et de publier l'application avec les fonctionnalités restantes. Et chaque fois que je regarde AdGuard pour iOS, je ne peux m'empêcher de penser à tout ce qu'il aurait pu être, et cela me rend un peu triste.
Epilogue
Ne vous méprenez pas. Je ne suis pas d'avis que les boutiques d'applications sont des incarnations du mal et que nous devrions tous retourner à l'installation manuelle des applications. Mais je suis également absolument certain que les boutiques telles que nous les voyons aujourd'hui restreignent les développeurs et paralysent leur créativité. Et je ne vois aucun progrès à cet égard, les limitations ne font qu'augmenter en nombre, et jamais l'inverse.
Je ne pense pas qu'il y ait une solution facile à ce problème, et cet article n'avait pas pour but d'en fournir une. En fin de compte, des entreprises comme Apple et Google emploient rarement des gens au hasard. Ce sont tous des individus très intelligents et ils n'ont pas besoin des conseils d'un énième développeur. J'aimerais simplement croire que notre histoire deviendra un autre grain de sable sur la balance et qu'elle aidera Apple et Google à comprendre les développeurs et leurs motivations un tout petit peu mieux.